Portraits

 bateau home page

Angélique Ionatos, par Jean-Pierre Léonardini, journaliste

Angélique Ionatos a la passion de l’essentiel (…) La voix qui jaillit, de cette mince créature brune, a des accents de bronze. C’est la voix même d’Antigone et de la Grèce profonde. Rien d’archaïque, pourtant dans la posture (…) Ses doigts sur la guitare n’ignorent pas la virtuosité moderne. (…) Chaque chant témoigne d’une bonté noble, d’une sorte de fierté amicale. C’est qu’elle porte au plus haut la parole d’urgence d’un peuple aux longues racines, à qui l’humanité est infiniment redevable. Cette beauté d’arc tendu, cette force du dedans bondissant au dehors dans une langue à la fois proche et lointaine, méduse le public qui passe, en un clin d’œil, de l’écoute recueillie à l’ovation brûlante.  l’exigence farouche saisit plus durablement le cœur que l’exhibition frivole.

 

 

 Par Bertrand Dicale, auteur – journaliste

 Angélique Ionatos n’est pas seulement grecque. Elle n’est pas seulement musique, poème, guitare limpide, voix rauque. Elle n’est pas seulement l’emmêlement des fidélités et des mémoires. Angélique Ionatos est une femme en mouvement. Son chemin est plus fait d’explorations que d’appartenances et de certitudes. Elle est nomade, nomade depuis toujours et nomade partout. Mais cette nomade est enracinée.

« Les poètes sont ma patrie », dit-elle volontiers. Elle parle de la langue grecque comme de son plus grand amour, mais elle n’y est pas enfermée. Elle était à peine adolescente quand ses parents ont préféré la liberté de l’Europe pluvieuse au soleil du temps des Colonels. Angélique n’avait plus de pays ; elle en garderait la langue. À onze ans, la guitare. À dix-huit ans, des chansons en français avec son frère. À vingt ans, elle rompt les amarres en renouant ses racines : elle commence un parcours unique dans l’oeuvre des poètes de langue grecque. Angélique Ionatos met en musique Odysseus Elytis, Sappho de Mytilène, Kostis Palamas, Kostas Varnalis, Constantin Cavafy, Dimitris Mortoyas, tout un panthéon de verbe ébloui et d’enchantement radieux. En une vingtaine d’albums et au moins autant de spectacles différents, elle a mené une trajectoire qui tient presque plus de la liberté de la comédienne que des pratiques habituelles de la musique : elle chante aussi des vers de Federico Garcia Lorca traduits en grec et Les Clowns de Gianni Esposito, des élans de duende et Les Bienfaits de la lune de Charles Baudelaire…

Voici ce qui rend irremplaçable Angélique : de ce qu’elle écrit, elle exige autant de sens que de sensualité. Absolument littéraire et absolument musicienne. Absolument grecque, absolument autre.